Bienvenue sur weppsy, un ensemble d’articles écrits par des psychologues à destination du grand public.

Ce blog est issu du souhait de partager des idées du monde de la psychologie, de créer des échanges grâce à “une rencontre” avec des praticiens sur des sujets qui vous touchent et vous interrogent. Une rencontre car chaque texte est le fruit du travail personnel et de l’expérience d’un psychologue et porte dès lors sa signature. Vous trouverez ici une grande diversité d’approches : chaque article est l’expression d’un point de vue, d’une pratique. Nous sommes convaincus que la pluralité des approches et la dimension intégrative des pratiques nourrissent une réflexion riche et en mouvement. Nous vous invitons ainsi à explorer ces ressources avec ouverture et bienveillance, valeurs essentielles de notre réseau, que nous souhaitons prolonger et faire vivre dans ce projet avec vous.

L’objectif est ainsi de vous donner un maximum d’informations afin de faire avancer votre réflexion sur des sujets, et que vous puissiez faire des choix éclairés, concernant par exemple le type de psychologue ou de courant qui pourraient vous convenir au mieux.

Afin d’approfondir les thématiques abordées, vous trouverez des sources et des liens en bas des articles, qui sont des invitations à approfondir les thématiques abordées, ainsi que des informations sur l’auteur. Nous vous proposons de les retrouver sur leur fiche weppsy ou via leur site si vous souhaitez les contacter. Par ailleurs, comme vous le savez, ces écrits ne pourront pas répondre totalement à une problématique spécifique et personnelle, mais seront, nous l’espérons, un point de démarrage et un début d’éclairage pour vous. Aussi, rien ne remplacera un entretien avec un psychologue.

Les auteurs de weppsy sont des psychologues cliniciens, du travail, ou chercheurs, qui travaillent dans différentes organisations telles que l’hôpital, l’entreprise, les écoles ou encore comme indépendant. Ils sont tous diplômés de l'Ecole de Psychologues Praticiens.

Vous trouverez ci-contre des catégories, qui évolueront et s’enrichiront au fil du temps, afin de pouvoir vous repérer au mieux et cibler vos recherches.

Maintenant, à vous d’explorer !

Le pari de l’intergénérationnel

Faivre, Psychologue et Entrepreneuse, Co-fondatrice de Tom&Josette)

par Pauline Faivre, Psychologue et Entrepreneuse, Co-fondatrice de Tom&Josette
le 2021-05-11

Le pari de l’intergénérationnel

«Le lien intergénérationnel est l’ultime manière de nous rendre sensible l’idée d’éternité dans un monde marchand et désenchanté.»

Serge Guérin, “La guerre des générations aura-t-elle lieu?” 

Les liens intergénérationnels ont été le ciment de notre société pendant des générations. Alors pourquoi ne pas les créer sous une forme nouvelle, adaptée aux enjeux d’aujourd’hui ? Nous avons tout à gagner à valoriser l’expérience de ceux qui nous précèdent en les plaçant, dès que cela est possible, dans une situation de transmission.

L’importance des 1000 premiers jours de la vie d’un jeune enfant fait aujourd’hui consensus au sein de la communauté scientifique : du 4ème mois de la grossesse jusqu’aux 2 ans de l’enfant, il connaît un rythme de croissance et de développement unique et rapide à l’échelle d’une vie humaine.

Le rôle des EAJE (Etablissements d'Accueil du Jeune Enfant), qui peuvent accueillir le jeune enfant dès l’âge de 10 semaines, est déterminant dans le développement de l’enfant au cours de ces 1000 premiers jours, et plus largement au cours des trois premières années de sa vie.



Les bienfaits de la relation intergénérationnelle avec une personne senior pour l’enfant


Une attention bienveillante et désintéressée


“Élever des enfants consiste essentiellement à les tourner vers les autres et à leur permettre de construire une relation de confiance en leur futur. Or, aujourd’hui, cette dynamique est renversée : nous sommes dans un climat de peur du futur et de suspicion envers la société”, expose le Rapport Giampino.


Or, la personne âgée peut porter sur l’enfant un regard neuf et désintéressé, là où la relation enfant-parent est aujourd’hui de plus en plus marquée par le stress, la pression qui repose sur les épaules des parents et les attentes projetées sur l’enfant. Par exemple, les parents d’un enfant dont l’acquisition du langage est plus tardive que celle d’autres enfants de leur entourage risqueront de s’en inquiéter et de sur-stimuler l’enfant. La personne âgée quant à elle, peut savoir d’expérience que le rythme d’acquisition langagière de chaque enfant lui est propre, et ainsi, ne pas s’en inquiéter.  

La personne âgée peut alors apporter à l’enfant une attention bienveillante et désintéressée, qui l’accepte pour ce qu’il est et sans angoisse; et cette relation va favoriser la prise de conscience par le jeune enfant de sa propre individualité en renforçant sa confiance en lui-même.
On peut d’ailleurs résumer cette phase du développement comme l’enfant exprimant son besoin vis-à-vis de l’adulte : “aide-moi à prendre conscience que je suis”.


La relation enfant-personne âgée fait expérimenter un rapport au temps apaisé à l’enfant

Le rapport au temps des parents n’est pas celui de l’enfant.

Le rapport Giampino souligne l’accélération du temps à laquelle les parents sont confrontés, et le décalage entre la temporalité du monde professionnel et celle de l’enfant : « Alors que les parents évoluent dans un monde professionnel où priment de plus en plus la rapidité, l’efficacité, la fluidité, les enfants sont comme des grains de sable qui bloquent les rouages de cette belle machinerie ». Dans ce cadre là, «souvent, les parents ne sont pas assez présents à la situation, à ce qu’ils font » (Béatrice Copper-Royer). On pourrait résumer en disant que la phrase que le jeune enfant entend le plus avant ses trois ans est “dépêche-toi !”.


L’équipe de la micro-crèche intergénérationnelle Tom&Josette à Rennes observe que les enfants, comme les adultes, sont plus calmes, sereins, patients, quand ils sont en présence des résidents.  Pour 6 familles sur 10, l’enfant a pris confiance en lui.


Notre entretien avec Mme Elodie Masanet, la psychologue de l’EHPAD Péan (dans lequel est intégrée une micro-crèche) avait fait ressortir le cas d’une jeune enfant d’ordinaire peu persévérante dans les activités proposées : là où elle ne pratiquait d’habitude une activité coloriage que pendant une dizaine de minutes, la présence et les encouragements d’un résident de l’établissement, placé dans une position de “tuteur” au cours de l’activité, avait permis à l’enfant de rester concentrée sur cette activité pendant près de 45 minutes.


Enfants et personnes âgées partagent un besoin universel : besoin d’attention, de tendresse, de temps.

Le lien intergénérationnel crée ainsi une rupture dans un monde où on ne prend plus le temps : l’intergénérationnel c’est finalement prendre le temps pour l’autre, prendre le temps de prendre soin, et appréhender la différence.



Pour l’enfant et sa famille : la rencontre avec la différence

Le jeune enfant n’a pas peur de la personne âgée : il accepte ses différences telles qu’elles sont. La rencontre régulière avec des personnes âgées, notamment à l’âge où l’enfant consolide son identité en se confrontant à l’Autre et découvre la socialisation et la relation à l’autre (entre 2 et 3 ans), est un rempart de taille contre les peurs et préjugés associés à la différence.


Pour les parents de l’enfant, les contacts fréquents et ordinaires avec des personnes âgées conduisent à un changement de regard et de perception de la personne âgée. Le lien intergénérationnel, dans le cadre d’une valorisation des capacités de chacun, est donc un levier d’inclusivité et un rempart contre l’âgisme, cette forme de discrimination qui touche les personnes âgées.


Les bienfaits de la relation intergénérationnelle avec un jeune enfant pour une personne âgée


Ajouter de la vie aux jours et retrouver un rôle social


“Les trois fléaux que sont la solitude, le sentiment d’impuissance et l’ennui constituent l’essentiel de ce qui contribue à la souffrance des personnes âgées”, énonce le manifeste de l’ONG américaine The EDEN Alternative, dédiée à la qualité de vie des seniors.


La relation avec un jeune enfant transforme le quotidien de la personne âgée par sa spontanéité et par l’absence de préjugés de l’enfant envers elle. La relation se noue alors d’abord par le regard, le sourire, le toucher, le jeu ou la transmission.


Ces relations, dans lesquelles la personne âgée adopte un rôle d’aîné ou de grand-parent, lui permettent de renouer avec le sentiment d’utilité sociale, de trouver un but et un rôle social valorisant, ce que le psychologue Cameron Camp traduit par la notion “d’engagement.” Les résultats de 3 études menées par Camp avec des activités intergénérationnelles mettant en relation des enfants et des personnes âgées souffrant de troubles cognitifs montrent que les activités intergénérationnelles de type Montessori conduisent à davantage d’engagement : la personne âgée étant plus activement impliquée dans l’activité ou dans l’interaction avec le soignant que dans une condition standard d’activités.  


La société doit prendre conscience de la richesse immense qu'il y a à impliquer les personnes âgées, adapter l’environnement pour leur donner un rôle.

C’est la clé de l’intergénérationnel qui repose sur la réciprocité dans la relation.

Ce sentiment de pouvoir donner, être utile est vital et il doit correspondre à une réalité.


Stimulation cognitive et motrice


La relation avec l’enfant peut stimuler la mémoire, des émotions, de l’attention de la personne âgée : elle fait appel à des souvenirs et des émotions enfouis et à la mémoire des gestes.

Cette relation s’accompagne généralement d’une stimulation physique quasi-inconsciente et spontanée (se baisser pour ramasser ce qui est tombé, se lever pour montrer quelque chose à l’enfant…), qui vient du fait que la personne âgée sent que l’enfant a besoin de lui.  


Cette stimulation peut se révéler particulièrement pertinente en ce qui concerne les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Olivier de Ladoucette explique ainsi que “la maladie d’Alzheimer altère différentes fonctions cognitives, différentes mémoires. Néanmoins, la mémoire affective, celle des émotions et la capacité à entrer en relation avec l’autre demeurent longtemps conservées. C’est là-dessus qu’il faut capitaliser. Il est souvent vain de vouloir réanimer des fonctions cognitives très détériorées, mais on peut continuer à interagir au niveau émotionnel.”


En conclusion, développer davantage la relation intergénérationnelle répond aujourd’hui :


  • aux défis éducatifs que présente l’accélération dans notre rapport au temps dans le développement du jeune enfant,

  • au défi de la prise en charge de la dépendance et de l’entrée dans une société de la longévité : quel rôle social voulons-nous donner à nos aînés ?

  • au défi de société qu’est l’âgisme et la question du regard que nous portons en tant que société sur la personne âgée.



C’est sur cette vision forte que nous avons fondé avec mon associée, Astrid Parmentier, Tom&Josette.


Ce projet qui nous est cher se fonde sur les besoins que partagent le jeune enfant et la personne âgée (besoin de tendresse, d’un cadre rassurant qui favorise l’autonomie, d’un rapport au temps apaisé) et sur ce qu’ils peuvent s’apporter mutuellement.



En savoir plus sur notre projet


Tom&Josette est un réseau de micro-crèches intergénérationnelles. Tom&Josette intègre des micro-crèches dans des établissements pour les personnes âgées avec un projet pédagogique basé sur la richesse du lien intergénérationnel au quotidien pour les enfants et les personnes âgées.

Tom&Josette est entouré d’un comité scientifique qui mène une recherche dans les crèches afin de montrer les bienfaits de ce lien au quotidien.


Le projet de liens intergénérationnels mené par Tom&Josette concerne d’abord des jeunes enfants à partir du moment où ils marchent et sont en train d’acquérir le langage, âgés d’environ 18 mois à la veille des 4 ans.


Son ossature est un projet de lien quotidien basé sur activités très simples. Certaines d’entre elles peuvent avoir en particulier la finalité de stimuler l’éveil sensoriel de l’enfant (éveil musical par exemple), sa mémoire et son attention (lecture de contes, histoire), la coordination oeil-main, etc. La durée de ces activités est d’environ une demi-heure. Toutes ces activités ont pour finalité la création de liens entre le jeune enfant et la personne âgée. Elles se fondent sur les piliers de la pédagogie développée par Maria Montessori : autonomie, libre-choix, apprentissage par l’expérience. Ainsi, l'activité n'est jamais imposée mais proposée à l'enfant et à la personne âgée. Ceux qui veulent participent avec leurs capacités, sans aucun objectif de rendement ou de production.




Pauline Faivre

Son profil Linkedin

Tom&Josette




Références


Serge Guérin et Pierre-Henri Tavoillot. La guerre des générations aura-t-elle lieu ?,Calmann Lévy (2017)

Rapport de Sylviane Giampino : Développement du jeune enfant – Modes d’accueil, Formation des professionnels (2016) 

https://solidarites-sante.gouv.fr/ministere/documentation-et-publications-officielles/rapports/famille-enfance/article/rapport-de-sylviane-giampino-developpement-du-jeune-enfant-modes-d-accueil


The Eden Alternative® is an international, non-profit 501(c)3 organization dedicated to creating quality of life for Elders and their care partners, wherever they may live.

https://www.edenalt.org/


Revolutionizing the Experience of Home by Bringing Well-Being to Life (The Eden Alternative) : 

https://www.edenalt.org/wp-content/uploads/2020/08/DomainsofWellBeingWhitePaper2020Revision-200802-212515.pdf





Les troubles de l’attention chez l’enfant. Vers une prise en charge idéale

Papeians, Psychologue Clinicienne)

par Charlotte Papeians, Psychologue Clinicienne
le 2021-03-03

Les troubles de l’attention chez l’enfant. Vers une prise en charge idéale

Même si le diagnostic de TDA/H (Trouble de l’Attention avec ou sans Hyperactivité) est rarement posé avant l’entrée en CP, une prise en charge peut être mise en place dès le plus jeune âge. En effet, bien qu’à cet âge certaines fonctions telles que l’attention, l’inhibition, la planification ou la flexibilité sont en cours de développement, plus cette prise en charge est holistique et précoce, meilleur sera le pronostic dans le développement de l’enfant. Ce qui est d’autant plus important lorsque ce dernier présente un défaut d’inhibition, une gestion émotionnelle difficile et/ou des habiletés sociales peu développées.


Au vu de ces éléments de repérage précoce, que pouvons-nous proposer comme prises en charge à un enfant scolarisé en classe de maternelle ?


Voici quelques précisions afin d’approfondir ce sujet ensemble.

Qu’appelle-t-on les fonctions exécutives ? Qu’est-ce que l’inhibition, l’intelligence émotionnelle et les habiletés sociales ?

Les fonctions exécutives sont les fonctions supérieures du cerveau incluant l’activation, la planification, l’inhibition et la flexibilité. Or, pour l’enfant qui rentre au CP, elles sont encore « immatures », c’est-à-dire en cours d’acquisition.

L’inhibition est la capacité à contrôler ses pensées, ses émotions, son comportement, en centrant son attention sur ce qui est demandé. Bien évidemment, le développement de l’inhibition se fait progressivement et n’est pas optimal en maternelle mais, en tant que professionnels, nous pouvons d’ores et déjà accompagner l’enfant dans un meilleur contrôle de soi.

L’intelligence émotionnelle regroupe la conscience de soi, la maîtrise de soi, la motivation interne, l’empathie et les compétences sociales.

Quant aux habiletés sociales, il s’agit d’un « ensemble de capacités qui nous permettent de percevoir et de comprendre les messages communiqués par les autres, de choisir une réponse à ces messages et de l’émettre par des moyens verbaux, de façon appropriée à une situation sociale » (Baghdadli & Brisot-Dubois, 2011). Ces habiletés se développent très fortement au cours des trois années de maternelle.



Dans le cadre d’un suivi psychologique, plusieurs orientations peuvent être envisageables, en individuel ou en groupe, avec ou sans les parents. Parmi toutes ces possibilités, comment s’y retrouver ?


Comprendre la demande précise

Dans un premier temps, le psychologue clinicien ou le neuropsychologue aura pour objectifs de comprendre la demande sous-jacente, de prendre le temps de s’intéresser à l’environnement de l’enfant à travers des entretiens avec l’enfant, ses parents et des échanges avec l’école pour proposer un accompagnement des plus adaptés et utiles à un instant T. Et la demande peut évoluer dans le temps compte-tenu des besoins des parents, de l’enfant et de son développement.  


Aider à développer son intelligence émotionnelle

Dans un second temps, un accompagnement psychologique peut être mis en place afin d’aider l’enfant à développer son intelligence émotionnelle. C’est souvent par ce biais-là que l’enfant arrive en séance du fait de difficultés de comportement à la maison et/ou à l’école avec un débordement émotionnel que bien des parents qualifient de « crises ».


Il s’agit alors d’accompagner l’enfant dans la connaissance de soi afin qu’il repère notamment quelles émotions le traverse et pourquoi et quels sont ses besoins pour s’apaiser. L’aider à développer un regard positif sur soi en travaillant notamment sur l’estime de soi, l’autonomie physique et psychique apparaît également nécessaire dans l’accompagnement proposé.


Par ailleurs, des séances autour de la problématique d’inhibition sont souvent bien utiles en complément afin d’apprendre à attendre avant d’agir, à anticiper, à ne pas être impulsif et bien analyser ce que la personne peut lui demander.


De nombreux jeux pour des enfants de maternelle (Bazar Bizarre, Pippo, Cocotaki, Uno, etc.) vont dans ce sens et sont à utiliser, quand c’est possible, à la maison afin de généraliser ce qui est vu en séance.


Or, le programme INEMO (IN pour INhibition et EMO pour EMOtions) est une bonne illustration de ce qui peut être proposé aux enfants âgés entre 3 et 6 ans afin de les aider à développer leurs capacités d’inhibition et compétences socio-émotionnelles. Ce programme, développé en Belgique par Alexandra Volckaert et Marine Houssa, Docteures en psychologie, est à destination des enseignants et a pour visée de prévenir d’éventuelles difficultés comportementales telles que l’agitation, l’impulsivité, l’inadaptation sociale ou des difficultés émotionnelles en stimulant de manière ludique les capacités d’inhibition et en apprenant aux enfants à gérer leurs émotions et les situations de conflit, grâce à des outils scientifiquement validés, qui pourront également être utilisés à la maison. En effet, se préoccuper des émotions d’une part et de l’inhibition d’autre part est une manière d’agir de manière préventive mais aussi de commencer à rééduquer les difficultés que rencontre l’enfant et d’accompagner les parents dans leur ajustement compte-tenu des spécificités de l’enfant.


Les parents comme de vrais alliés thérapeutiques

Il apparaît souvent nécessaire de travailler avec le parent car il va pouvoir mettre en place un certain nombre d’outils à la maison et généraliser ce qui a été vu en séance. Les parents ont alors un grand rôle à jouer et leur coopération et leur confiance sont nécessaires si nous voulons que l’enfant évolue de manière positive. Un soutien à la parentalité, de manière ponctuelle, peut donc être associé à des séances individuelles. Il consiste en l’information sur les difficultés rencontrées par l’enfant et comment modifier son environnement, son éducation, l’enseignement ou l’adaptation de ceux-ci à l’enfant et à ses symptômes.



A eux seuls, les suivis psychologiques suffisent-ils ?


Bien souvent, une prise en charge en psychomotricité, surtout quand la prise en charge est précoce apparaît nécessaire et assez bien acceptée par les enfants car elle est ludique. Il s’agit de proposer une rééducation des fonctions mentales et motrices par l’intermédiaire du corps. Dans le cas d’enfants où nous suspectons un trouble de l’attention, le psychomotricien aura pour rôle, entre autres, d’aider l’enfant à développer ses stratégies de contrôle et de résolution de problèmes.


Par ailleurs, le psychologue peut orienter vers un orthophoniste si le langage met du temps à se mettre en place ou s’il y a des difficultés de prononciation. Par la suite, un suivi orthophonique peut être nécessaire dans le cas de présence d’un trouble spécifique des apprentissages (les fameux troubles « dys ») notamment dans le cas de dyslexie/dysorthographie.


Les rééducations orthoptiques apparaissent généralement nécessaires dans le cadre par exemple, de discrimination visuelle, de mémorisation de séquences visuelles, de discrimination figure/fond. Pour rappel, l’orthoptiste est spécialisé dans les troubles de la vision et peut aider un enfant présentant des difficultés d’attention à développer ses stratégies du regard, à améliorer son balayage visuel.


Le psychologue aura particulièrement à cœur de coordonner l’ensemble des prises en charge afin d’amener une cohésion dans les soins et rééducations apportés à l’enfant et de soutenir les parents. Le lien avec l’école est également primordial afin de comprendre de manière objective comment l’enfant gravite dans cet environnement et quels aménagements spécifiques peuvent être proposés.



Par la suite, compte-tenu du développement de l’enfant, qu’est-ce qui peut être proposé ?


Une fois que le diagnostic a été confirmé par un professionnel spécialisé dans le trouble de l’attention et que l’enfant a atteint un certain âge, d’autres prises en charge peuvent être mises en place.


Les bénéfices essentiels d’une approche multimodale

En effet, une approche multimodale avec plusieurs modalités d’intervention apparaît nécessaire à mettre en place pour un meilleur résultat.

De nombreux programmes sont développés notamment au Québec avec Pierre-Paul Gagné (MétoAction, MémoAction, Apprendre avec Reflecto) afin de comprendre les divers mécanismes et fonctionnements mentaux qui entrent en jeu de manière consciente dans tout apprentissage, qu’il soit concret ou abstrait. C’est une approche métacognitive de prise de conscience de ses stratégies mentales qui permet d’apprendre à apprendre. Ce type de prise en charge peut être une bonne entrée en matière quand l’enfant a les capacités métacognitives suffisamment développées à savoir vers 8-9 ans.


La remédiation cognitive

Une fois que l’enfant a pris conscience de sa façon de réfléchir, nous pouvons proposer de la remédiation cognitive (ou rééducation neuropsychologique) qui consiste en une approche cognitivo-comportementale où, par des exercices de stimulations spécifiques, l’enfant va d’une part apprendre à utiliser des aptitudes cognitives différentes pour contourner ses difficultés et d’autre part développer les fonctions où persistent des lacunes par de l’entraînement. Les interventions neurocognitives partent de l’hypothèse que l’entraînement de fonctions cognitives cibles (attention, mémoire de travail et fonctions exécutives) peut réduire les difficultés liées au TDA/H avec une prise de conscience des difficultés, la stimulation des fonctions déficitaires et la mise en place de stratégies de compensation adéquates.


L’importance de l’accompagnement des parents

En parallèle, l’accompagnement des parents, sous forme de coaching ou de soutien à la parentalité, apparaît toujours nécessaire en les aidant à mettre notamment en place un système éducatif propre à leur enfant. En groupe, les interventions psychoéducatives auprès des parents avec les groupes types Barkley sont un autre axe d’intervention, bien souvent complémentaires d’autres prises en charge. Ces approches apportent souvent une aide significative sur les comportements parentaux, les relations familiales et le fonctionnement psychosocial de l’enfant ayant un TDA/H.


Le groupe : un atout de choix pour les enfants

Toujours en groupe mais cette fois-ci à destination des enfants, le psychologue peut proposer notamment deux types de groupe.


Un groupe d’habiletés sociales aura pour objectifs, entre autres, d’améliorer la reconnaissance et l’expression des émotions, de favoriser l’expérimentation des relations sociales positives en apprenant notamment la coopération et les fonctionnements adaptatifs et d’exploiter les forces personnelles et remobiliser leur estime de soi. A chaque séance, la problématique inhibition/flexibilité est également traitée.


Un groupe de remédiation cognitive (comme peut le proposer Pifam, Programme d’Intervention sur les Fonctions Attentionnelles et Métacognitives développé par Francine Lussier) aura pour buts, à travers 12 séances, de développer la métacognition et d’acquérir des stratégies d’apprentissages propres et généralisables à l’école et à la maison afin notamment de développer son attention visuelle et auditive, sa mémorisation, sa flexibilité, sa planification, son contrôle de l’impulsivité et sa résistance à la distraction. L’idée sous-jacente est d’amener les enfants à une certaine autonomie et que les outils soient trouvés par eux-mêmes et non plus par leurs parents.


Ces interventions groupales amènent bien souvent une nouvelle dynamique dans la prise en charge et sont souvent bien vécues par les enfants ; ces derniers montrant souvent à partir d’un certain âge une certaine lassitude dans les prises en charge individuelles. Cela permet également de mettre en pratique ce qui a été perçu en séances individuelles et de développer notamment l’aspect habiletés sociales.



Les autres modalités thérapeutiques complémentaires

Par ailleurs, des séances de graphothérapie peuvent être mises en place. Il s’agit d’une rééducation de l’écriture auprès d’enfants ou d’adolescents dysgraphiques, c’est-à-dire présentant des difficultés de mise en place de l’écriture : écriture illisible et peu soignée, écriture trop lente, tenue anormale du stylo.


L’ergothérapie apparaît également bien souvent essentiel notamment avec l’entrée au collège : accompagnement des enfants atteints de TDA/H afin de préserver et développer leur indépendance et leur autonomie dans leur environnement quotidien et social, mise en place de l’outil informatique pour alléger l’effort cognitif qu’engendre la prise de note manuscrite.


Enfin, les méthodes pharmaceutiques (présentes depuis les années 50-60) sont une solution parmi d’autres. Ce sont généralement des traitements à base de psychostimulants (telles que le méthylphenidate ou l’atomoxétine qui sont deux types de molécules) afin d’augmenter la stimulation cérébrale. Les médicaments interagissent au niveau de la régulation hormonale en palliant le déficit. La méthylphenidate, par exemple, ralentit la destruction de dopamine ; celle-ci agit donc plus longtemps et stimule de manière plus efficace les cellules responsables du contrôle de l’attention.



En conclusion, le trouble de l’attention est un trouble qui dure depuis plusieurs mois et s’exprime dans différentes situations. Il n’est donc pas lié à un contexte (sanitaire par exemple) ou à une situation précise (maladie ou autres) du fait de sa durabilité et quand nous reprenons l’anamnèse de chaque enfant, nous retrouvons bien souvent des signes précurseurs assez tôt dans leur développement.

De fait, un accompagnement psychologique peut être mis en place même si l’enfant est jeune d’autant que plus cette prise en charge sera précoce et globale, meilleur sera le pronostic dans le développement de l’enfant même si, bien entendu, il faut tenir compte de la sévérité du trouble, des éventuelles comorbidités et du profil singulier de chaque enfant.

En effet, les trois symptômes du TDA/H que sont le déficit d’attention, l’hyperactivité motrice et l’impulsivité ont des intensités et des manifestations qui varient selon l’enfant et ont des expressions différentes. Il faut noter qu’on ne peut pas guérir du trouble de l’attention mais que grâce à cet accompagnement sur mesure en collaboration avec les parents, l’école et les différents professionnels qui gravitent autour de l’enfant, nous pouvons pallier certaines difficultés de l’enfant et diminuer les répercussions négatives sur l’environnement familial, scolaire et social.


Charlotte Papéians

Son profil Weppsy


Du même auteur : 

Le TDA/H (Trouble de Déficit de l'Attention, avec ou sans Hyperactivité) : un repérage précoce est-il possible ?


Ressources :


Pour les enfants


Pour les parents



Pour les professionnels