Bienvenue sur weppsy, un ensemble d’articles écrits par des psychologues à destination du grand public.

Ce blog est issu du souhait de partager des idées du monde de la psychologie, de créer des échanges grâce à “une rencontre” avec des praticiens sur des sujets qui vous touchent et vous interrogent. Une rencontre car chaque texte est le fruit du travail personnel et de l’expérience d’un psychologue et porte dès lors sa signature. Vous trouverez ici une grande diversité d’approches : chaque article est l’expression d’un point de vue, d’une pratique. Nous sommes convaincus que la pluralité des approches et la dimension intégrative des pratiques nourrissent une réflexion riche et en mouvement. Nous vous invitons ainsi à explorer ces ressources avec ouverture et bienveillance, valeurs essentielles de notre réseau, que nous souhaitons prolonger et faire vivre dans ce projet avec vous.

L’objectif est ainsi de vous donner un maximum d’informations afin de faire avancer votre réflexion sur des sujets, et que vous puissiez faire des choix éclairés, concernant par exemple le type de psychologue ou de courant qui pourraient vous convenir au mieux.

Afin d’approfondir les thématiques abordées, vous trouverez des sources et des liens en bas des articles, qui sont des invitations à approfondir les thématiques abordées, ainsi que des informations sur l’auteur. Nous vous proposons de les retrouver sur leur fiche weppsy ou via leur site si vous souhaitez les contacter. Par ailleurs, comme vous le savez, ces écrits ne pourront pas répondre totalement à une problématique spécifique et personnelle, mais seront, nous l’espérons, un point de démarrage et un début d’éclairage pour vous. Aussi, rien ne remplacera un entretien avec un psychologue.

Les auteurs de weppsy sont des psychologues cliniciens, du travail, ou chercheurs, qui travaillent dans différentes organisations telles que l’hôpital, l’entreprise, les écoles ou encore comme indépendant. Ils sont tous diplômés de l'Ecole de Psychologues Praticiens.

Vous trouverez ci-contre des catégories, qui évolueront et s’enrichiront au fil du temps, afin de pouvoir vous repérer au mieux et cibler vos recherches.

Maintenant, à vous d’explorer !

La bienveillance a ses limites !

Mouton, Psychologue Clinicienne)

par Aude Mouton, Psychologue Clinicienne
le 2020-10-13

La bienveillance a ses limites !

Pourquoi ce tapage à propos de la bienveillance ? Pourquoi punir et donner la fessée jusqu’alors le « bon » choix est aujourd’hui si décrié ? Comment l’enfant peut-il apprendre et comprendre les limites sans punition ?


Tout est une question d’âge.


Avant 6 ans, le cortex préfrontal n’est pas suffisamment développé pour faire son travail : réguler les émotions de façon efficace.

Nous avons tous vécu ce grand moment de solitude face à notre enfant en complète tempête émotionnelle devant… son biscuit cassé. Notre cerveau d’adulte analyse la situation et ne comprend pas que la frustration de ne pas avoir son gâteau comme on le veut, la déception de voir la cassure, puisse provoquer un tel comportement. L’émotion peut apparaître chez l’adulte mais elle est vite « contrôlée » par le cerveau et produit un comportement « a minima » car l’émotion est intériorisée.

Nous avons tous tenté d’expliquer avec calme que « non, il n’y a plus de raisins » devant un enfant qui nous répond sans relâche que « oui, mais moi j’en veux un maintenant ! »

Le cortex préfrontal qui permet d’accueillir une émotion et de la soumettre au concept de la réalité (= prendre du recul) n’est pas encore fonctionnel. L’enfant n’est donc pas en mesure de comprendre que son désir doit être soumis à une réalité concrète.

Tout cela pour dire que l’enfant avant 5 ou 6 ans n’est pas à même de contrôler un grand nombre de ses vécus émotionnels et cela se perçoit par des comportements qui ne sont pas « acceptables » socialement. (Vous pouvez lire “Au coeur des emotions de l’enfant” de Filliozat)


Alors comment expliquer que les punitions « marchent »


Tout d’abord, marchent-elles vraiment ? Il faut bien souvent un grand nombre de répétitions de punitions pour que le comportement disparaisse. Une punition inclut toujours une notion de peur. On propose un déplaisir, une peur, à l’enfant face à un comportement. C’est alors une autre partie du cerveau qui est mise en route. Le « système de récompense », qui comprend les récompenses et les punitions, provoquent des productions hormonales qui vont amener le sujet à répéter ou éviter un comportement. C’est la base du training animal.

Donc à long terme, il est vrai que le comportement s’accentue ou s’arrête mais cet entraînement n’est pas un apprentissage à long terme. L’enfant a du mal à faire le lien entre la punition et « l’intérêt » de la punition. Et même les adultes… combien d’entre nous râlent lorsqu’ils reçoivent un PV ? Un excès de vitesse est un danger pour tous… mais le PV reste une punition inacceptable et désagréable, qui change peu nos comportements sur la route. Les études montrent d’ailleurs un meilleur changement chez le conducteur après un stage qui explique les dangers plutôt qu’après une amende.

Les comportement qu’un parent veut faire cesser ou provoquer chez son enfant comporte généralement une notion d’acceptation sociale.

Si on réfléchit vraiment à la règle que l’on veut mettre en place, on devrait y trouver une logique, une rationalisation sociale, un intérêt dans le développement de l’enfant.
Dans ce cas, il est toujours possible de trouver une solution intelligente de répondre à la situation.


Et comment faire pour les comportements dangereux ?


L’obéissance est à différencier de la soumission. Dans une relation de confiance, l’enfant sera plus enclin à faire confiance à la personne qui le sécurise.

L’enfant qui a un comportement dangereux (mord, traverse la route, ne s’attache pas en voiture ..) n’est souvent pas en recherche de provocation. Cette compétence arrive plus tard (après 6/7 ans). Il est peut-être dans la recherche des limites, c’est-à-dire comprendre la différence bien/mal, acceptable/inacceptable, etc. mais il est surtout, le plus souvent, dans une recherche de relation, de rapproché à l’autre.

Ouvrir le dialogue, expliquer, rendre possible l’expression du sentiment est toujours une bonne idée. Un enfant est très rapidement dans le conflit quand il est en désarroi avec ses propres émotions. Un enfant va aussi chercher à « prendre le contrôle » pour se sentir puissant et fort.

Un enfant a très vite une sensation de frustration car il vit dans un monde de plaisirs et il n’est pas capable de se rendre compte de l’importance des demandes de la réalité.
Tout ceci ne sont pas des excuses pour le laisser faire ! Tout ceci sont des connaissances essentielles pour lui verbaliser et l’amener à développer ces compétences.



Un enfant a besoin de limites.


Oui. Absolument vrai.

La parentalité bienveillante n’est pas l’absence de limite : la parentalité bienveillante est la tentative de poser des limites de façon respectueuse de l’enfant, de son développement et de son intégrité.

Les violences ordinaires sont nombreuses :

  • Demander à un enfant un contrôle émotionnel que son cerveau n’est pas capable de produire

  • Demander à un enfant une absence d’émotion ou une variation émotionnelle

  • Ne pas proposer de dialogue ou d’empathie

  • Les atteintes physiques (la fessée, la tape sur la main)

  • Les atteintes verbales, c’est-à-dire les insultes, le dénigrement, les menaces

Mais aussi :

  • Laisser tout faire à l’enfant, lui donner le choix sur tout

  • Ne pas avoir d’exigence et le laisser seul assumer ses comportements

  • Le laisser dominer l’autre, qu’il soit un autre enfant ou un autre adulte.

Ceci aussi sont des violences ordinaires car l’enfant rentre dans une toute puissance très anxiogène dont il est très dur de sortir.

Pour se sentir en sécurité l’enfant a besoin de sentir que son parent est stable, sûr de lui, qu’il est un guide fiable. Les adultes ont une supériorité intellectuelle, développementale, physique, d’expérience. Ils doivent absolument imposer un cadre de vie à l’enfant dans lequel celui-ci peut se développer en sécurité. Ce cadre est l’ensemble des règles de la société, de la famille que l’enfant doit apprendre à suivre pour être un membre actif de la communauté dans laquelle il vit. On peut choisir de l’aider à se développer par contrainte ou par coopération.


Mais alors comment faire ? Comment trouver un juste milieu ?


Vos buts à long terme

La première étape me semble être de réfléchir au long terme. Comment voulez-vous que vos enfants soient dans 20 ans ? En se projetant dans le futur, on trouve les réponses à nos demandes éducatives. Se tenir correctement à table est une demande classique, qui change d’un pays à l’autre mais qui reste une aptitude importante à apprendre. Si on imagine nos enfants dans le futur, on peut alors leur expliquer que manger correctement est une marque de respect de l’autre, c’est une compétence qui nous permet d’appartenir à un groupe, de respecter l’espace autour de nous et ceux qui nettoient après nous…  


Éduquer par l’exemple.

Si vous voulez des enfants empathiques, soyez empathique envers eux. Si vous voulez des enfants attentifs, soyez attentifs à eux. Si vous voulez des enfants authentiques, soyez authentiques… Nos enfants se crient dessus, disent des gros mots et tapent parce qu’ils imitent ce qu’ils voient.

Un enfant imite jusqu’à tard dans son développement, et vous êtes sa principale source d’inspiration !

Comment un enfant peut-il comprendre qu’il est mal de taper… en se faisant taper ? C’est une ambivalence que le cerveau ne peut pas accepter. Et si les mots le disent, l’expérience physique reste la même : je suis dominé par la douleur physique, je dominerai par la douleur physique.  


La punition

J’aimerais vous proposer ici de tenter la “coopération” à la place de la punition. Votre famille est une équipe, une communauté et suivre le chef du groupe est important pour que l’ensemble de la communauté fonctionne.

Expliquez vos besoins: "J’ai besoin que tu ailles te mettre en pyjamas pour avoir le temps de faire le dîner”. “J’ai besoin que tu ailles te laver les mains pour que nous profitions tous d’une maison propre”.  

Proposez-lui de participer à la conversation éducative. Même très jeune vos enfants vous surprendront par leur capacité à analyser ce qu’ils vivent. Vous pouvez ainsi faire la liste de ses responsabilités dans le groupe (toujours en accord avec son âge)

Choisissez un sujet qui vous importe dans vos valeurs familiales et tentez de faire comprendre à vos enfants son importance. Ayez une discussion à propos de pourquoi on le fait, les conséquences de suivre ce principe et de ne pas suivre ce principe, comment le gérer en famille, qui est une petite communauté. Tentez le partenariat sur un sujet et voyez les effets rapides !

Enfin, vous pouvez rappeler à votre enfant qu’il a encore le choix devant vos ordres: il peut coopérer s’il se sent capable, ou exprimer son vécu. Un enfant a parfois un sentiment qui le bloque: il n’a pas fini son jeu et il voudrait quelques minutes supplémentaires, il ne se sent pas capable de faire la tâche demandée, il a besoin d’aide ou de soutien… en lui rappelant qu’il peut soit obéir, soit exprimer les raisons de sa “désobéissance”, vous continuez de construire une relation de confiance et non de soumission, vous créez un environnement de cohésion.

Pour mieux comprendre, je recommande les livres de Guéguen et Filliozat pour découvrir des outils techniques, ainsi que les livres de Faber & Mazlish. Enfin, parler de vos expériences pendant des ateliers ou groupes de paroles peut également être très efficaces.


Aude Mouton

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Le TDA/H (Trouble de Déficit de l'Attention, avec ou sans Hyperactivité) : un repérage précoce est-il possible ?

Papeians, Psychologue Clinicienne)

par Charlotte Papeians, Psychologue Clinicienne
le 2020-09-29

Le TDA/H (Trouble de Déficit de l'Attention, avec ou sans Hyperactivité) : un repérage précoce est-il possible ?

     Ces dernières années, nombreux sont les parents qui se questionnent sur un éventuel TDA/H (Trouble De l’Attention avec ou sans Hyperactivité) chez leur progéniture et ce même avant l’entrée en CP. Ils s’inquiètent souvent au sujet des motifs suivants : « je dois répéter plusieurs fois avant que mon enfant réalise ce que je lui demande » ; « c’est une pile électrique » ; « il bouge tout le temps » ; « il fait des crises de colère » ; « il ne tient pas en place en classe » ; « il n’écoute pas », etc.

Ces réactions et ces comportements doivent-ils alerter quant à un éventuel trouble de l’attention et ce, même chez des enfants scolarisés en classe de maternelle ? Ou cela fait-il partie de leur immaturité cérébrale et de leurs fonctions exécutives qui ne sont pas totalement développées ? En effet, ces dernières sont l’ensemble des fonctions cognitives impliquées dans la régulation intentionnelle de nos pensées et dans la réalisation de nos comportements en fonction des buts que nous nous sommes fixés (dont mémoire de travail, planification, inhibition, flexibilité). Elles se construisent au fil du temps et ce, dès la première année de la vie et particulièrement entre l’âge de 3-5 ans.


De fait, il apparaît difficile de se prononcer sur un éventuel TDA/H avant l’âge de 6-7 ans.
Mais, des signes d’appel sont à prendre en compte afin de mettre en place un accompagnement adapté le plus précocement possible même si le diagnostic n’est pas posé d’emblée. Nous partons alors du postulat que plus une prise en charge de l’enfant et de l’entourage est précoce, meilleure sera l’inscription de l’enfant au sein de sa famille, de son école et avec ses pairs (cf. projet INEMO, www.inemo.be).


Le premier signe d’appel s’apparente à un défaut d’inhibition, dans la plupart des contextes (ou dans tous) et avec tout le monde.


Or, l’inhibition est « la capacité à centrer son attention, à gérer ses émotions et son comportement. Elle permet d’éviter d’avoir des comportements impulsifs. C’est l’inhibition qui nous aide à centrer son attention afin d’accomplir la tâche demandée sans se laisser distraire par les stimuli de son environnement, comme le bruit » (Rafiqi, 2017).

L’inhibition renvoie donc au contrôle intentionnel des pensées, des comportements et des impulsions.

Quelques exemples d’un déficit d’inhibition chez les enfants : au cours du jeu Jacques a dit, l’enfant n’arrive pas à inhiber son action à accomplir quand la demande n’est pas précédée de « Jacques a dit… ». En classe, c’est l’enfant qui est incapable de ne pas se retourner quand un camarade parle et à demeurer attentif aux explications de son enseignant. Lors de rédaction, c’est quand l’enfant est souvent hors sujet car il n’inhibe pas ses idées non pertinentes et non en accord avec ce qui lui est demandé au préalable.


Un autre signe d’appel est le manque de flexibilité, fonction qui est étroitement liée à l’inhibition.


Or, « la flexibilité́ nous permet de faire des changements rapidement entre deux tâches et nous aide à tolérer les changements imprévus » (Caron, 2011; Chevalier et Blaye, 2006; Gagné et al., 2009). Cette composante nous permet de prendre conscience de nos erreurs et d’y remédier en modifiant nos stratégies cognitives. Elle nous permet également d’être plus créatif afin de fournir plusieurs idées différentes pour une même situation.

Nous pouvons retrouver cette fonction dans de nombreuses situations : par exemple, deux enfants jouent au gendarme et au voleur. L’un des enfants commence par le voleur puis change de rôle. Ou, un enfant construit une tour avec des blocs et si celle-ci s’effondre, il doit recourir à une autre stratégie afin de reconstruire la tour. Dans les relations avec les autres, nous pouvons la retrouver au cours de conflits lorsqu’il s’agit de faire des compromis, par exemple lors de choix de jeux. Ou, lors de situation d’apprentissage comme les calculs où il faut passer d’une opération à une autre sans confusion.


Par ailleurs, l’enfant peut avoir une mauvaise régulation émotionnelle du fait de son intelligence émotionnelle qui peine à se développer.


Or, l’intelligence émotionnelle correspond à la capacité à identifier ce qu’on éprouve, à savoir mettre des mots dessus, en comprendre l’origine, en reconnaître le déclencheur immédiat et les causes plus cachées. C’est également la capacité à identifier et à comprendre les émotions des autres mais aussi à pouvoir gérer de manière efficace ses propres émotions et ses relations interpersonnelles.

De fait, elle est constituée de 5 composantes :

  • La conscience de soi : il s’agit notamment de la compréhension de ses émotions, de la capacité à s’autoévaluer et de la confiance en soi. Cette composante se développe au fil des années et dépend de ses capacités intrapersonnelles.

  • La maîtrise de soi : il s’agit de la gestion de ses émotions et de ses impulsions, de la conscience et de l’adaptabilité à une situation. Nous voyons bien ici que du fait de leur faible inhibition et de leur flexibilité limitée, le contrôle de soi apparaît hasardeux et ce, même après l’entrée en CP où il leur est demandé plus de maîtrise.

  • La motivation interne

  • L’empathie : c’est la capacité à détecter et à interpréter correctement les émotions d’autrui et de comprendre les autres. Il s’agit alors de prendre le temps de décoder les signes faciaux, comportementaux et verbaux chez les autres afin d’apporter la réponse adéquate. Mais, du fait d’un manque d’attention visuelle notamment, ces enfants ne « voient » pas les signes que leurs interlocuteurs peuvent leur donner.

  • Les compétences sociales.


Un manque d’intelligence émotionnelle peut ainsi entraver la qualité des interactions sociales (5e composante) qui constitue un autre signe d’appel. Il s’agit notamment d’une difficulté à s’adapter à l’autre du fait d’une mauvaise analyse, d’une non-application des codes sociaux (regarder l’autre, s’intéresser à l’autre, faire des compromis, etc.). Dans ce cas-là, l’enfant peut avoir du mal à nouer des relations avec les autres enfants, il a du mal avec les règles du jeu, à faire des compromis, à contrôler son comportement. Il peut avoir une mauvaise analyse des situations sociales et souvent, a un biais d’attribution associé (projette sur autrui ce qu’il imagine que l’autre pourrait penser).


Bien que d’autres réactions et comportements peuvent alerter les parents, les signes que nous avons décrits constituent les plus prégnants et répandus. Les autres signes d’appel peuvent être par exemple : absence de persévération et/ou d’effort cognitif à savoir que l’enfant a du mal à aller au bout de ce qu’il entreprend notamment quand il est face à la difficulté, problème d’attention soutenue, difficulté d’organisation, lenteur dans la réalisation des choses notamment au niveau de l’initiation, etc.


Face à ces différents signes, un accompagnement notamment psychologique et/ou psychomoteur associé ou non à une guidance parentale peut être proposé dans le but d’agir de manière préventive. Il s’agit notamment de stimuler de manière ludique les capacités d’inhibition des jeunes enfants, de leur apprendre à gérer leurs émotions et de les aider à comprendre et à appliquer les codes sociaux notamment dans les situations de conflit. Des trucs et astuces peuvent également être fourni aux parents et aux enseignants afin que l’enfant soit aidé dans tous ses milieux de vie, ce qui amène de meilleurs résultats.


Charlotte Papéians



Quelques pistes de lecture pour les parents :


  • Mon enfant s’oppose. Que dire ? Que faire ? du Dr Gisèle George

  • Cent idées pour mieux gérer les troubles de l’attention de Francine Lussier

  • TDA/H La boîte à outils d’Ariane Hébert

  • Ces parents à bout de souffle. Un guide de survie à l’intention des parents qui ont un enfant hyperactif de Suzanne Lavigueur

  • L’enfant hyperactif de Marie-France Le Heuzey

  • Réponses à vos questions sur l’hyperactivité. Reconnaître l’hyperactivité et aider l’enfant à la surmonter de Michel Lecendreux, Eric Konofal et Monique Touzin

  • Comment aider mon enfant hyperactif ? de Marie-Claude Saiag, Stéphanie Bioulac et Manuel Bouvard


Quelques pistes de lecture pour les enfants :


  • Mon cerveau a besoin de lunettes, Québecor, 2010, rédigé par le Dr Annick Vincent

  • Le cousin hyperactif de Jean Gervais

  • Edgar-la-bagarre de Roger Poupart

  • Max est dans la lune de Dominique de Saint Mars et Serge Bloch



Rester parents quand on se sépare

Mouton, Psychologue Clinicienne)

par Aude Mouton, Psychologue Clinicienne
le 2020-06-16

Rester parents quand on se sépare

La douleur personnelle, que partager ?

Vous voulez protéger vos enfants de votre propre souffrance et vous avez tout à fait raison. Ils ne sont pas capables d’assumer le rôle de confident, ils ne sont pas à même de comprendre les tenants et les aboutissants de votre situation d’adulte.Il est cependant primordial de partager avec votre enfant, en des termes qu’il comprend, des éléments de votre vécu affectif.

Nous ressentons tous de façon inconsciente ce qu’il se passe chez l’autre : en analysant les expressions du visage, les tons de la voix, les émotions que nous avons à leur contact. Vous-même adulte, si vous entrez dans une pièce à la toute fin d’une dispute entre deux collègues, vous serez à même de ressentir la tension entre ces deux personnes. Si vous entendez que « tout va bien » vous serez alors mal à l’aise car votre intuition vous donne une information de tension, et votre raisonnement, voulant faire confiance à l’information, vous indique que tout va bien. Si vos collègues ont l’honnêteté de vous dire qu’ils ont un différend, mais que cela les regarde eux, vous vous sentez tout d’un coup plus serein : vous avez une information cohérente avec votre intuition émotionnelle.


 “Que vous le vouliez ou non, vos enfants savent, sur un plan inconscient, émotionnel, intuitif, que votre relation est douloureuse ou tendue”

Vous avez bien compris le parallèle fait avec une situation de séparation parentale : que vous le vouliez ou non, vos enfants savent, sur un plan inconscient, émotionnel, intuitif, que votre relation est douloureuse ou tendue. Mettre des mots sur cette situation la rend plus facile pour votre enfant, cela le rassure sur son intuition, et vous lui permettez d’être en situation de cohérence émotionnelle.



Comment le dire ?



La façon d’évoquer les conflits ou les problèmes d’adulte avec un enfant n’est pas toujours évidente. On a peur d’en dire trop, de faire peur, de devoir accueillir leurs réactions.

Vous trouverez une bonne façon d’en parler en vous posant la question de savoir ce qui « appartient » à votre personne et ce qui « appartient » à la famille. En effet, votre couple est le fondement de la famille, de celui-ci découle le couple parental, et de ce partenariat découle la parentalité telle que vécue par votre enfant.

Votre identité personnelle et votre relation amoureuse vous appartiennent et ne concernent pas directement vos enfants. En revanche la dynamique familiale et ce que vivent vos enfants, oui.

Vous trouverez les mots lorsque vous aurez fait le tri entre ce que vous vivez vous, en tant qu’homme/femme, mari/femme, et ce que vivent vos enfants avec leurs papa et maman, les personnes avec qui ils vivent. Vous trouverez les mots qui parlent de façon vague de difficultés d’adultes et vous pourrez replacer le sujet sur leur bien-être à eux.

« Papa et maman sont tendus, ils ont beaucoup de questions d’adulte. Ce sont des histoires personnelles, nous t’aimons tous les deux et toi tu as tes histoires d’enfant.»

« Papa et maman sont en train de prendre des décisions de couple, ce qui est important c’est que tu puisses être toi car nous t’aimons comme tu es. »

Vous voyez dans cet exemple le minimum employé pour parler de ce qui touche la sphère adulte mais qui le rassure sur son vécu intuitif, en le replaçant dans son rôle d’enfant dont il n’a pas à bouger.




Le sujet le plus important : l’amour inconditionnel



Replacer l’enfant dans son rôle d’enfant vous ouvre la porte sur le deuxième sujet le plus anxiogène pour l’enfant : votre amour. Les enfants vivant ce contexte de divorce sont souvent sujets à ce que nous appelons « l'angoisse de séparation ».

En toute logique, si mes parents peuvent arrêter de s’aimer, ils arrêteront peut-être un jour aussi de m’aimer moi.

En toute logique, si le couple de mes parents explose, c’est potentiellement ma relation avec papa ou maman qui peut aussi exploser un jour.

Les paroles d’amour, portées sur la relation uniquement, sont importantes pour les enfants et primordiales chez l’enfant de parents qui se séparent. Nous parlons ici d’évoquer à votre enfant un amour qui n’a pas de condition, qui ne comporte aucune autre condition que le lien qui vous unit.

Je vous recommande vivement le livre « Mon amour » qui permet de dire tout cela à votre enfant par le biais d’une lecture. Vous pouvez prendre l’habitude de dire de façon régulière, au coucher par exemple : « Je t’aime, parce que tu es toi, parce que tu es mon fils/ma fille, tu es une personne essentielle au monde, je t’aime parce que c’est comme ça, je t’aime tous les jours et pour toujours ». Est repris dans ce bel ouvrage le concept des paroles d’amour de la thérapeute Bernadette Lemoine sur l’angoisse de séparation.

Ces paroles un peu « bisounours » peuvent paraître inutiles, étranges, à côté de la plaque… mais vous trouverez comment les faire vôtres afin de transmettre à votre enfant cette sécurité interne primordiale à son bien-être.

Vos enfants ont un grand besoin de se sentir sereins dans la relation qu’ils ont avec vous et avec leur autre parent. Rassurer un être cher sur la pérennité de la relation et de l’amour qui vous unit est toujours utile et sain.



Préserver l’image de l’autre parent



La tâche la plus dure est souvent celle de préserver l’image de votre ex-conjoint.

Vos enfants sont les vôtres, mais ils sont aussi les enfants de votre conjoint, que vous le vouliez ou non, que votre amour ait duré ou non. Plaçons-nous au niveau de l’enfant : lui a deux parents, qu’il n’a pas choisi et qui sont les modèles de sa vie, les principaux acteurs dans son développement. Un enfant grandit en répondant aux attentes, aux injonctions, aux interdictions, aux valeurs de ses deux parents. L’image de la femme et de la mère ainsi que de l’homme et du père se créent chez les enfants en réponse à leurs relations avec leur mère et leur père : c’est ainsi.

Vous êtes peut-être dans la colère, dans l’injustice, dans la tristesse, dans la trahison, dans la violence, dans le rejet… ou tout autre forme du deuil de votre relation. Mais votre ex-conjoint reste une figure primordiale dans le développement de votre enfant, avec ses limites, ses défauts et ses excès, mais c’est ainsi.

Il apparaît primordial d’essayer de dissocier votre ex-conjoint et ce qu’il représente pour vous dans votre vie de ce qu’il est en tant que parent dans la vie de votre enfant. Il en va du bien-être et de la santé mentale de vos enfants.

Vous pouvez néanmoins rester authentique dans vos discours en dissociant justement comme vous l’avez fait pour parler de la séparation. « Ton papa/ta maman a fait certains choix dans notre relation d’adulte mais je sais qu’il/elle t’aime et que tu l’aimes et votre relation est précieuse, tu as le droit d’aimer les adultes importants de ta vie même si moi je ne l’aime plus »

On pourrait penser que dire de telles choses est inutile et que votre enfant « sait » mais nous en revenons à cette incohérence profonde qu’un enfant peut ressentir que nous appelons « conflit de loyauté ». L’enfant pense bien souvent devoir prendre parti, devoir défendre un parent, devoir choisir un camp. Vous pouvez penser que dire de telles choses est impossible ou ridicule mais il semble important de penser en termes de papa/maman et non pas en termes de mari/femme. Votre enfant vit une relation avec son parent qui n’est pas la relation que vous vivez avec cette même personne.  

En offrant ce message à votre enfant, vous le débarrassez d’un énorme poids, d’une grande incertitude, et d’une grande souffrance.

Votre enfant a besoin de continuer à voir chacun de ses deux parents pour ce qu’ils sont pour lui : un père, une mère, qui l’aime chacun à leur façon.


Aude Mouton

Sa fiche sur weppsy 


Sources:

- The Intelligent Divorce : Taking care of your children, Mark Banschick and David Tabatsky

Mon amour, de Astrid Desbordes (Auteur), Pauline Martin  (Illustrations) 2015

- Maman ne me quitte pas ! : Accompagner l'enfant dans les séparations de la vie. Bernadette Lemoine et Anne-Marie d' ArgentréSaint-Paul éditions religieuses

collection Enquêtes 

La revalorisation de l'enfant : quand les parents et l'école sont dans une impasse, comment ouvrir un nouveau chemin ?

Bailly, Psychologue Clinicienne)

par Roseline Bailly, Psychologue Clinicienne
le 2020-03-03

La revalorisation de l'enfant : quand les parents et l'école sont dans une impasse, comment ouvrir un nouveau chemin ?

 Chaque parent souhaite le meilleur pour son enfant. Mais qu’est-ce que le meilleur ? Quels outils veut-on leur transmettre pour leur donner les meilleures chances dans la vie qui sera la leur ? Et avec qui, quand, comment doit-on le partager pour s’assurer que c’est bien intégré ?


Les parents : guides rassurés-rassurants dans ce qui leur est connu


 Les parents sont ceux qui connaissent le mieux leur enfant. Ils sont ceux qui le voient grandir, évoluer, devenir un individu avec son caractère, ses envies, ses besoins et ses limites. Ce sont aussi ceux qui vont ouvrir des chemins, guider les premiers pas de l’enfant dans le monde. Ils vont faire des choix pour lui et - parfois souhaitons-le - accompagner aussi ses propres choix.

 Chaque parent va souhaiter le meilleur pour son enfant selon ses propres références. En effet nous désirons donner ce qui nous est précieux. Pour son enfant on ne veut pas se tromper. Et quoi de plus risqué que de donner de l’inconnu. Par définition, nous n’en avons pas les coordonnées et le résultat n’est pas garanti. L’inconnu est un risque dur à prendre pour son enfant tant l’on souhaite son bonheur. Mais nous sommes infiniment limités. Nous ne serons jamais qu’une personne constituée par l’ensemble de ses (nos) expériences. Et bien que nous puissions compléter, inventer, tenter, pour l’enfant, nous ne pouvons pas tout. Alors parfois on se retrouve coincé à ne plus comprendre sur quel fil tirer pour le sortir de l’ornière de l’incompréhension.

Trouver l’équilibre entre le connu et l’expérimentation, le degré d’adaptation nécessaire pour faire face quotidiennement aux défis que rencontre l’enfant, n’a rien d’aisé. Le connu rassure le parent, et un parent rassuré c’est un parent rassurant pour l’enfant.
 Mais l’enfant peut exprimer un besoin, une détresse à laquelle on ne sait pas comment répondre parce que celle-là on ne l’a pas rencontrée. Parce que dans notre boîte à outils il n’y a pas le bon tournevis. On a testé tous ceux que l’on avait mais aucun ne convient. Alors l’inconnu devient le lieu de la réponse et le parent se retrouve en terrain étranger avec plus ou moins d’inquiétude.


Quand l’école vient signaler une inadéquation


 Parmi les partenaires qui « cultivent » l’enfant il y a l’école. Le premier lieu où il y a un cadre, des règles à respecter. Ceci à un âge où l’on considère que l’enfant peut s’adapter, apprendre, faire et ne pas faire. Plus petit il nous semble naturel de nous, adultes, nous adapter. Parce que l’enfant ne peut pas choisir en conscience, prendre sur lui, temporiser. A partir de 3 ans, on estime que l’enfant est prêt à intégrer, progressivement, de l’ailleurs, de l’extérieur avec tout ce que cela engage. L’école est le lieu de cet apprentissage 8h par jour, au moins quatre jours par semaine, 36 semaines par an pour tous les enfants à partir de 3 ans.

 Le regard de l’enseignant est précieux. Ce qu’il perçoit de l’enfant n’a rien à voir avec ce que nous pouvons voir. Il a un référentiel de connaissances et d’expériences qui lui permettent de déceler des nuances et des reliefs que les parents ne peuvent pas relever. Et ceci simplement parce que le lieu de l’école est le même pour tous les enfants de la classe. Tandis que la famille, ses règles, son rythme, ses codes et ses valeurs diffèrent pour chacun.

Dans le tissage d’adaptation réciproque entre les parents et l’enfant, un tas de manques, de défauts de compréhension vont être absorbés parce que les parents ont cette écoute fine de leur enfant. Ils les anticipent, y parent, les préviennent, ce sont des pare-ents.
 Mais l’école n’est pas le lieu d’une écoute de cette nature. Il ne s’agit pas d’amortir le choc de la découverte du monde pour chaque graine fragile qui le découvre. Il s’agit du vivre ensemble dans la différence, la pluralité, et de la transmission d’un savoir formalisé. C’est intrinsèque à la façon dont est pensée l’école en France.

 Alors l’enseignant avec son regard plus global va repérer les besoins, les facilités et les difficultés de chacun. Il va tenter d’accompagner au mieux chaque enfant pour l’amener à trouver sa place dans le groupe classe, dans l’ensemble école et dans la société en tant qu’élève, apprenant, et individu en devenir.

C’est donc souvent l’école qui tire le signal d’alarme. Qui vient signaler que là, l’enfant ne peut plus, ne peut pas. Que quelque chose n’est pas en place. Dans les familles où il y a plusieurs enfants les parents peuvent comparer. Mais les enfants sont tellement différents, très vite il n’y a plus d’échelle qui donne la mesure. Et puis un parent entre le premier et le deuxième enfant n’est pas non plus le même parent. Il n’aura plus les mêmes craintes ni les mêmes exigences. Par contre l’enseignant demande à 25, 27, 30 enfants de faire la même chose. Certains y arrivent, d’autres non. C’est normal, il n’est attendu de personne de savoir ce que l’on ne lui a pas enseigné. Cependant, si en dépit du travail de pédagogie, d’apprentissage de l’enseignant, l’élève-enfant ne peut s’adapter, évoluer, s’enrichir et acquérir la capacité ; alors l’enseignant convoque les parents et leur fait part de son inquiétude.

 Et nous arrivons à la question de la responsabilité. Qui est chargé de former l’enfant au respect des règles ? Qui doit lui apprendre à rester assis, à lever la main, à respecter la parole et le corps de l’autre ? Qui doit s’assurer que la leçon est comprise ? Les enfants doivent-ils avoir des devoirs à faire à la maison ?

 Lorsqu’un enseignant convoque les parents c’est forcément un aveu d’impuissance. Qu’il soit de son ressort ou non de transmettre ces apprentissages, si l’on regarde simplement le résultat, en tant qu’adulte chargé d’enseigner, il échoue. Il vient dire l’imperméabilité de l’enfant à des apprentissages - qu’ils concernent le scolaire à proprement parler ou le vivre-ensemble – et l’échec de sa mission d’enseignement. Mais il s’agit aussi de l’échec de l’enfant qui comprend qu’il n’est pas comme il faut. Et enfin il s’agit de l’échec des parents qui n’ont pas pu éviter ça à leur enfant. Alors on peut essayer de définir des frontières de responsabilités. De faire des fiches de poste et des détails de missions. Mais surtout on peut réfléchir ensemble. C’est dans la co-construction que le meilleur travail se fait.

 Soit les parents et l’enseignant arrivent ensemble à rétablir le cap, à aider l’enfant à s’adapter à ce que l’on attend de lui. Si ce n’est pas le cas et que les difficultés perdurent, alors ils en viennent à demander de l’aide extérieure.


Quels leviers pour redonner élan à l’enfant et cap aux accompagnants


 Le cabinet d’un psychologue est un lieu de travail privilégié mais ce n’est pas le seul. Une activité de groupe peut tout à fait être le lieu de l’intégration d’un apprentissage que ni les parents ni l’enseignant n’arrivent à faire passer. Au judo, au foot, à la danse, les contraintes et les enjeux ne sont pas les mêmes. Il y a des règles, des objectifs. Le droit à l’erreur et l’attente d’un effort fourni.

Mais surtout l’activité est normalement choisie par l’enfant, et parce que c’est le lieu où réside son désir, il aura une écoute, un élan, une motivation qu’il n’aura pas ailleurs. Il récupère de la souplesse dans son fonctionnement et peut à nouveau absorber.
 Là où dans le milieu scolaire il produit déjà de tels efforts d’adaptation qu’il n’est plus en mesure de faire plus. Quant au milieu familial, il est le théâtre de quantité d’enjeux qui sont déjà difficiles à réguler dans le temps imparti entre les soirées et les weekends. Pour intégrer de nouvelles règles du vivre ensemble, encore faut-il en créer les circonstances qui les rendent nécessaires. Pour motiver un effort d’apprentissage en mathématiques, encore faut-il que l’enfant en voit l’utilité pour fournir l’effort supplémentaire nécessaire à l’intégration du savoir.

Les enfants ont cependant une capacité épatante à récupérer de l’élan. Un petit espace/temps de bien-être où ils sont regardés, valorisés, écoutés suffit à relancer toute la machine. C’est vite dit mais quand un enseignant ou un parent a-t-il le temps de se poser au calme avec l’enfant pour passer un moment où l’on fait ensemble l’activité qu’il souhaite ? Encore faut-il en avoir envie de cette activité. Sinon les mille choses à faire, à transmettre prennent vite le dessus. Et pourtant souvent elle est là, la clé du cadenas qui empêche de rouler.

 Le rôle de l’adulte quel qu’il soit est de faire en sorte d‘encourager l’épanouissement de l’enfant. D’accompagner son développement. Aucun d’entre nous ne peut donner à un enfant tout ce dont il aura besoin pour tracer toute sa route. Je ne suis pas enseignante, je ne pourrais pas faire de judo avec lui, quant à mes capacités de footballeuse, mieux vaut ne pas en parler. Je peux prendre le temps de l’écouter, faire avec lui une activité où je sais que l’on va toucher du doigt la question de l’échec, de la règle, du respect, de l’échange. Une activité qu’il souhaitera réussir et où il ne veut peut-être pas perdre. Mais surtout, parce que c’est une activité qu’il aura choisi, parce que l’on partagera un moment dont il aura défini un certain nombre de paramètres, il sera plus ouvert. L’élastique de sa capacité à absorber se détend et alors il peut entendre les mots que je pose sur ses maux.

Comme on vient tendre la main à un enfant qui ne sait plus vers où aller et qui n’est plus capable de faire ne serait-ce qu’un pas en avant ou un pas de côté pour se décaler et mieux voir ; je viens mettre des mots et le chercher là où il est bloqué sans visibilité ni direction. La boussole ne vous dit pas où aller, elle vous redonne le nord. Encore faut-il que l’on vous en donne une si vous avez perdu la vôtre.

 Espérons qu’ensemble nous puissions guider quand c’est nécessaire, encourager et soutenir quand manque le regard qui relance. Nous mobiliser pour que l’enfant se déploie au mieux en ayant toujours en tête que, par chance, nous ne sommes pas les seuls qui croiseront son chemin. L’enfant vivant apprend de tout, permettons-lui quand nous ne savons plus comment le guider, d’apprendre aussi de tous pour que son chemin s’étende plus loin encore et plus librement.


Roseline Bailly
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Quelques idées pour approfondir :

Psychologie et jeux de société : quels rapports ? Le jeu en tant que médiation thérapeutique et aide à la parentalité

Devalois, Psychologue Clinicienne)

par Laetitia Devalois, Psychologue Clinicienne
le 2020-02-25

Psychologie et jeux de société : quels rapports ? Le jeu en tant que médiation thérapeutique et aide à la parentalité

 Pourquoi utiliserait-on des jeux dans un cabinet de psychologie ? Le psychologue pourrait-il avoir besoin d’autre chose que de fauteuils et d’une table ? Il pourrait même vous proposer des jeux de société accessibles à votre famille ? Qu’est-ce donc que cette histoire !

 Le jeu de société a le vent en poupe depuis quelques années : les bars à jeux fleurissent, les ludothèques regorgent de boîtes colorées, YouTube voit émerger des chaînes parlant de jeux de société, de jeux de rôle ; on parlerait même d’une psychologue ayant mis en place un jeu de rôle policier dans un EHPAD.

 Pourquoi je vous évoque cela ? Car le jeu de société, en psychothérapie, permet une médiation lorsque l’alliance thérapeutique a du mal à se mettre en place par l’échange verbal. Cet outil va fonctionner comme l’objet transitionnel mis en évidence par Winnicott. C’est un objet qui permet d’aménager le réel lorsque ce dernier peut devenir anxiogène. Winnicott a en effet élaboré cette théorie pour expliquer entre autres l’existence des “doudous”. Au début de sa vie, l’enfant doit être en permanence en lien avec les figures d’attachement (généralement les parents), puis ensuite le doudou permet de supporter leur absence car il symbolise le lien. Il s’agit de la première expérience créatrice de l’enfant. Ensuite, ce lien est intériorisé, ce qui permet à l’enfant de progressivement se détacher de l’objet au profit d’un investissement plus large de ce qu’on appelle l’espace transitionnel. C’est cet espace qui permet d’accéder au jeu et à la créativité et donc de faire baisser l’angoisse. Le jeu permet de faire le pont entre la réalité et le besoin d’omnipotence, c’est à dire le besoin de ressentir du contrôle. On remarque à quel point ce phénomène est frappant dans l’investissement des jeux vidéos par les adolescents, par exemple : je crée mon avatar et donc mon identité, je contrôle certains aspects du jeu quand la réalité ne me convient pas toujours...


 Si cela est possible en psychothérapie, pourquoi cela ne le serait-il pas dans la relation au sein d’une famille ?


 La médiation en psychothérapie permet de créer ce que nous appelons une « alliance thérapeutique », élément nécessaire pour le bon déroulement d’une prise en charge. Elle la soutient lorsqu’un patient peut avoir des difficultés à verbaliser. La médiation peut également avoir un effet cathartique, qui permettrait d’extérioriser le trop plein d’émotions pouvant être présent dans le quotidien de la personne. « L’expérience psychique n’est pas immédiatement saisissable – du moins à l’origine –, l'individu va devoir ainsi la « médiatiser » pour pouvoir s’en saisir, pour la décondenser et réduire, peu à peu, la complexité de sa présentation, pouvoir explorer ses aspects énigmatiques » (Roussillon, 2012).


 Plusieurs types de médiations existent : artistiques, psycho-corporelles ou encore celles utilisant le jeu vidéo. Je vais plus particulièrement vous parler des jeux de société. Le jeu de société est un outil utile en séance aussi bien auprès d’enfants, d’adolescents que d’adultes.

Il permet d’expérimenter un certain nombre de choses qui ne sont pas propres à la relation thérapeutique, comme la tolérance à la frustration ou la capacité à coopérer, par exemple. Expérimenter dans le Réel et avec son thérapeute peut permettre d’ouvrir des portes qui ne se seraient ouvertes que plus tard dans la relation thérapeutique.
De plus, le thérapeute, témoin et acteur de l’activité, permet un échange plus fourni avec son patient. 

Si un échange est facilité dans une relation thérapeutique, pourquoi ne pas l’envisager aussi dans une relation intra-familiale ?

 Être parent n’est pas toujours facile, être un enfant ou un adolescent non plus. Il arrive que des tensions puissent émerger pour diverses raisons (problématiques à l’école, au travail, au sein du couple parental, de comportement, etc.), que les relations entre membres d’une même famille se dégradent et que la communication se tarisse. Dans les moments comme ceux-là, il peut être compliqué de faire un pas de côté pour aller vers l’autre car on ne se sent pas reconnus dans son opinion ou ses émotions. Cela peut entraîner une répétition de situations qui mettent en souffrance tous les membres de la famille et qui renforcent les tensions déjà existantes. On se sent alors aspiré dans une situation complexe dont on ne sait plus comment en sortir. Alors, se retrouver autour d’une autre situation, une situation qui sort du contexte habituel peut servir à créer d’autres interactions, développer d’autres liens et se redécouvrir voire, pourquoi pas, discuter sereinement.


Le jeu de société a cette particularité qu’il met un objet au milieu de la relation; on ne parle donc pas de la relation en elle-même ou des problèmes en eux-mêmes mais du jeu.
Vous pouvez également choisir le type de jeu qui correspond à vos besoins : un jeu en « one to one » qui met à l’épreuve les capacités de stratégie pour gagner (comme Sushi Go ou Paper Tales). Un jeu en coopération, qui permet de trouver des façons de s’allier pour gagner contre le jeu, comme The Game ou Magic Maze. Ce type de jeu de société est d’ailleurs propice aux échanges.


 Il existe également des jeux plus narratifs comme le Dixit ou encore Feelinks. Ce dernier propose des situations, auxquelles chaque joueur doit associer l’émotion qu’elles suscitent. On lance alors un dé qui désigne une émotion puis chacun des joueurs parie sur le nombre de personnes qui auraient choisi cette émotion par rapport à la situation évoquée. Feelinks fait partie de ces jeux qui permettent d’échanger et de débattre sur des situations tout en ayant un support sur lequel on peut revenir si besoin, lorsque l’échange devient compliqué.


 Le jeu de société a la particularité de pouvoir créer de nouvelles situations au sein du milieu familial, « ce recours peut […] s’envisager comme facilitant des liens et rencontres (vers les autres et via son « corps-en-relation » » (Joly, 2012). Le « corps-en-relation » est une formulation de Ajuriagerra qui appuie le fait que les interactions entre les personnes ne sont pas basées que sur des échanges verbaux mais également sur la prise en compte du corps de l’autre, de son existence corporelle.

 Le manque de temps dû au rythme de vie qui s’accélère, aux métiers des adultes, aux journées denses des enfants et adolescents, peut mettre de la distance dans le rapport à l’autre au sein d’une famille. Un moment jeu de société serait un peu comme la soirée DVD qui pouvait se faire du temps des vidéoclubs.

Le jeu de société donne ainsi de nouvelles opportunités de construire de nouveaux souvenirs et de se retrouver autour d’une même activité.


Laetitia Devalois

Sa fiche sur weppsy

Sources : 

- Ajuriaguerra J. de, Angelergues R., 1962, « De la psychomotricité au corps dans la relation avec autrui, à propos de l’œuvre de Henri Wallon », in L’Évolution psychiatrique, 27 : 3-25

- Joly Fabien ‘‘Le médiatif comme expérience, le travail du médium comme appropriation subjective‘‘, Journal des Psychologues, 2012

- Roussillon René ‘‘Médiation et création. Pour une métapsychologie de la médiation‘‘, Journal des Psychologues, 2012

- Donald Winnicott, Jeu et réalité, Gallimard, 2002

- Donald Winnicott, Les objets transitionnels, Payot, 2010



Faites votre bilan écran: Un guide pour les parents

Mouton, Psychologue Clinicienne)

par Aude Mouton, Psychologue Clinicienne
le 2020-01-14

Faites votre bilan écran: Un guide pour les parents

 La question des écrans est un sujet très actuel : les parents d’aujourd’hui ne peuvent pas se baser sur leurs expériences car les écrans, leurs formes et utilisations ont rapidement évolué. Vous, parents actuels, avez un vécu de votre rapport aux écrans dans votre enfance qui se limitait à la TV, aux consoles de salon ou peut-être aux débuts des consoles portables, lourdes et en noir et blanc. On est loin des tablettes, des consoles portables à haute définition et des réseaux sociaux toujours en mouvement !


Quels types d'écran ?


 Il existe deux types d’écrans : les « passifs » et les « actifs ». Mettons dans la catégorie « écrans passifs » les activités qui ne nécessitent pas d'action de la part de l'enfant, comme un programme télé par exemple, ou un film sur n'importe quel support.

 Les écrans actifs sont les activités interactives, qui demandent une participation de la part de l'enfant, typiquement les jeux vidéos. Les réseaux sociaux se retrouvent à la frontière de ces deux catégories puisque nous pouvons être consommateur ou acteur.

L'écran passif a un effet hypnotique qui met le cerveau sur « pause ». Adulte, il est possible de regarder une émission et de réfléchir, de se cultiver. Les enfants ne sont pas dans cette démarche, ils regarderaient n'importe quoi et l'effet hypnotique est bien agréable mais source de risques avérés pour le développement physique, cognitif et affectif (1). L’aspect récréatif du film peut-être bien entendu un moment de détente, de partage en famille, d’accès à la culture (culture générale et sociale). Toutefois, il doit se limiter à cela. La tendance actuelle de l’écran passif est de se débarrasser de l’aspect contraignant de l’enfant, au restaurant, en voiture, en soirée…

 Demandez-vous à quel moment vous donnez accès à vos enfants à cette activité passive de détente. Le faites-vous par souci de relaxation, de détente, de partage ou parce que cela est pratique pour vous ?

L’écran actif peut avoir un effet d’apprentissage tout en restant limité. Dans sa recherche sur l’apprentissage au travers de plusieurs modes (avec des vidéos, via un appel en visio ou en face à face), la chercheuse Kathy Hirsch-Pasek (2) montre que rien ne remplace l’échange réel dans le transfert de compétences et dans l’apprentissage d’une langue, par exemple. Il faut donc bien voir l’écran comme un outil d’apprentissage parmi tant d’autres. Apprendre l’anglais, par exemple, peut s’appuyer sur des applications pour comprendre la grammaire ou mémoriser du vocabulaire. Tant que cet apprentissage ne sera pas passé en conversation, avec une composante émotionnelle, une mémoire des évènements et des situations, la connaissance de cette langue sera limitée et plus fragile dans le temps. Les enfants vont pouvoir apprendre la « chanson » des lettres ou la « chanson » des nombres, cependant comprendre la profonde signification d’un mot, d’un son, du nombre, devra passer par l’expérience matérielle ou relationnelle. Il leur est plus difficile de passer d’une expérience 2D à une expérience 3D car ils n’ont pas les mêmes capacités s’agissant du transfert de compétences ou de conceptualisation. Un mot ne prend son sens que dans son emploi et sa compréhension tacite.


L’écran solitaire


 C'est ici une question cruciale et une question d'éducation. Mettre les enfants devant un film ou un jeu permet d'avoir un moment de calme. Un enfant ne devrait pas avoir accès à un écran lorsqu'il est seul et le cas échéant, il devrait y avoir une discussion à la suite de l'utilisation pour permettre que l'expérience soit positive.

 Beaucoup de parents d’adolescents mettent en avant l’aspect social de certains jeux ou de certains réseaux sociaux. Il est vrai que certains jeux peuvent permettre une certaine cohésion d’équipe, ou permettre à un jeune de se faire inclure dans un groupe de pairs. Le danger est la perte de regard du parent sur la situation. Lorsqu’on laisse son jeune aller à une fête ou chez un ami, il paraît évident de le faire selon certains critères définis avec lui au préalable (connaître les amis, règles quant aux horaires, etc.. ) alors que le jeu en ligne chez soi donne une fausse impression de sécurité et le parent est bien souvent incapable de décrire les jeux auxquels son enfant joue, les personnes avec qui il parle, etc… Si votre parti pris est de laisser votre enfant jouer, renseignez-vous, jouez avec lui, comprenez les règles du jeux mais aussi les règles du groupe auquel il appartient.  


Quelle durée ?


 Tentez de compter vraiment la durée d'utilisation de votre enfant sur une semaine. Même les études ont du mal à se mettre d’accord et estiment le temps d’utilisation moyen entre 2h et 4h30 pour les enfants de 2 à 5 ans. Il existe une fonctionnalité dans votre téléphone qui vous permet de voir votre consommation quotidienne. Je vous invite à l’ouvrir et à prendre conscience de ce nombre d’heures pris dans votre journée. L’expérience est toujours enrichissante !

 La durée que vous trouvez juste, de 0 à plusieurs heures dépend de votre propre vision de l’écran dans votre vie et votre famille. Serge Tisseron a d’ailleurs développé un outil très pratique en s’inspirant de multiples recherches, vous trouverez son site à la fin de l’article. (3)



Quand ? À quel moment de la journée votre enfant est-il devant son écran ?


 Il est facile de donner de grandes leçons éducatives et tout le monde diffère. Voici cependant deux grands principes biologiques, qui permettent d’encadrer vos choix selon des critères objectifs.

  1. Évitez le matin avant l'école. Nous avons besoin au réveil de nous préparer mentalement pour notre journée. Entamez au petit déjeuner la discussion avec votre enfant : Que va-t-il faire aujourd'hui ? En classe, avec les copains, après l'école. Quelles sont ses envies du jour et de la semaine. Ce moment de réveil est important et permet au cerveau de s'ouvrir aux possibilités du jour. Un enfant qui a fait une heure d'écran avant d'arriver en classe aura une longueur de retard sur le plan de la concentration et de l'énergie.

  2. Les écrans devraient être éteints et rangés après 17h. À partir de cette heure, le corps se prépare à se coucher et à dormir. Proposer un écran après 17h peut provoquer des troubles de l'endormissement ou du sommeil. Si cet horaire est vraiment trop tôt, tentez de proposer un arrêt après le repas, puis avant le repas en reculant graduellement l'horaire d'arrêt.


Trouvez votre équilibre


 Ne diabolisons pas : le mot clé étant équilibre. Il est toujours facile dans ces débats difficiles de santé publique de pencher d’un côté puis de son extrême opposé. Au même titre que tous les points de santé publique, il est du devoir des professionnels de mettre en garde. Idéalement, vous mangeriez bio, ni trop gras ni trop sucré, des produits locaux et frais, sans alcool, sans fumer, sans excès, avec du sport mais pas trop, en campagne sans pollution…

 Mais la vie est aussi faite pour profiter, pour avoir du plaisir, du bien-être, de la détente.

Trouvez un point d’équilibre par rapport à l’écran, sans diaboliser et sans être trop permissif.

Réfléchissez à la place que cette activité a dans votre vie et celle de vos enfants. Demandez vous si vous trouvez cela adapté, bon pour son développement, ses compétences sociales et son équilibre psychique. Et adaptez en fonction !

 
Aude Mouton